« J’essayais de leur apporter sourire et joie [...] leur dire de profiter de cette expérience unique qui leur était donnée de chanter sur scène ! » Thomas Rortais


Ce projet mettait en scène un jeune acteur talentueux et sincère, choisi pour interpréter le rôle parlé de Dieu; que j'ai eu la chance d'interviewer : 

Marie Gouzonnat : Tout d'abord, je souhaitais savoir quel a été votre parcours d'acteur ainsi que vos études ?

Thomas Rortais : J’ai débuté le théâtre à l’âge de 13 ans, au Conservatoire de Mulhouse. J’ai suivi une formation littéraire avec option Théâtre à Colmar au lycée et parallèlement, une formation de 3 ans au Conservatoire de la même ville.

Ayant eu mon bac, je me suis donnée la possibilité de suivre des études littéraires en Hypokhâgne -année durant laquelle j’ai mis de côté ma pratique théâtrale. N'ayant pas été reconduit pour une deuxième année, je me suis demandé ce que je pouvais bien faire. Le Conservatoire de Lyon s'est tout naturellement imposé à moi, j'ai obtenu le concours et je suis rentré en Cycle d’Orientation Professionnelle, à raison de 20 heures de cours par semaine. Parallèlement, j’ai continué une formation en Lettres Modernes à Lyon 3 en Licence 2.

J’ai, pendant ma formation, rencontré Michel Raskine. Il m’a raconté vouloir monter Le Triomphe de l’Amour de Marivaux au TNP de Villeurbanne et cherchait un acteur pour le rôle d’Agis.

J’ai alors pu commencer une fabuleuse aventure théâtrale dans un spectacle que nous avons joué plus de 60 fois. J’ai fait une dernière année au Conservatoire de Lyon et suis devenu intermittent du spectacle. Depuis, je vais de projet en projet, entouré de différent-es metteur-ses en scène.


Marie Gouzonnat : De plus, j'ai remarqué que vous étiez un acteur éclectique. Vous avez travaillé pour le cinéma, fait beaucoup de théâtre et je vous ai apprécié dans Le meilleur d'entre nous, téléfilm de France 3. Comment choisissez vous d'accepter ou de refuser un rôle en général ?

Thomas Rortais : Cela dépend de plusieurs choses :

1-Mon envie de travailler avec tel ou telle metteur-se en scène.

2-La qualité du texte proposé si c’est un projet théâtral.

3-Ma disponibilité.

4-Pour le cinéma ou la télévision, comme c’est une pratique plus récente pour moi, j’ai tendance à être moins exigeant. Toutefois, il y a des réalisateurs-trices et/ou des scénarios qui me donnent aussi vraiment envie et j’ai tendance à déployer beaucoup d’énergie au moment des castings/rencontres pour tenter de faire partie du projet. Pour le Meilleur d’Entre Nous, je suis aussi très fan de biathlon et l’idée de faire de l’écran et du sport en même temps, c’était le pied !


Marie Gouzonnat : Concernant le projet, j'aurais souhaité savoir pourquoi vous avez accepté ce rôle, qui vous convient parfaitement je trouve.

Thomas Rortais : J’avais cette année très envie de retourner à l’Opéra. J’ai donc écrit au directeur de l’Opéra de Lyon qui m’a dit que Silvia Costa (la metteuse en scène de l’Arche de Noé) cherchait un acteur pour le rôle de Dieu. J’avais entendu beaucoup de bien de son travail, j’ai "postulé" et Silvia m’a donné une réponse positive le lendemain !


Marie Gouzonnat : Le rôle de Dieu était parlé. Quelles directions avez-vous suivies pour travailler votre interprétation ?

Thomas Rortais : Tout d'abord, j'ai accompagné la partie de l’installation publique d’environ 15 minutes avant le début du spectacle. J’étais en improvisation avec un mot d’ordre : parler en continu et monter le niveau d’énervement.

Par la suite, toute une partie du texte est parlée sur la musique : je dois donc être connecté à la cheffe d’orchestre. Je crois que suivre à ce point la partition musicale induit une certaine manière de parler, assez déclamatoire.

En outre, il y a des passages plus libres durant lesquels j’avais un peu plus de place pour donner une « couleur » au personnage, plus ou moins sympathique en fonction du moment de l’intrigue où j’intervenais.


Marie Gouzonnat : Souhaiteriez-vous réitérer l'expérience voire jouer un rôle chanté ?

Thomas Rortais : J’ai déjà joué dans un opéra, intitulé le Cercle de Craie (Kreidekreis) de Zemlinsky, mis en scène par Richard Brunel en 2018 à l’Opéra de Lyon. J’y jouais plusieurs rôles (parlés).

Je suis comédien et je ne peux (même si j’aime beaucoup chanter) prétendre à des rôles chantés qui sont voués tout naturellement à des chanteurs professionnels !


Marie Gouzonnat : L'entrée dans la salle s'est faite sur votre voix donnant des chiffres et des informations sur l'état de la planète. Nous avions rencontré Hervé Tugaut et évoqué avec lui l'enjeu climatique et métaphorique de la montée des eaux. J'avais remarqué dans les coulisses que vous aviez un papier avec des notes. Comment avez-vous préparé cette partie et quel message souhaitez-vous faire passer ?

Thomas Rortais : Il s'agit  d’une improvisation. J’ai le choix des mots et mes propos doivent être tournés sur l’état de la planète. Je dois aussi essayer de ne pas être trop sympathique, pour préparer le public à la sentence divine qui s’abat sur les Hommes en début d’opéra.

J’avais quelques notes assez techniques sur le rapport chiffré du GIEC mais le reste, je l’avais en tête. J’ai beaucoup pris à un documentaire passionnant d’Arte. Au Top départ, je commençais un discours de Greta Thunberg.


Marie Gouzonnat : L'arche de Noé était joué par la Maîtrise de Lyon. Aviez-vous l'habitude de travailler avec des enfants ? Comment avez-vous ressenti l'expérience ? Que vous ont-ils apporté personnellement voire professionnellement ? Ayant un regard mature sur leur travail, que pensez-vous de leur engagement dans la Maîtrise et quels conseils avez-vous pu leur apporter ?

Thomas Rortais : Travailler avec ces enfants était formidable. Je crois que le maître mot durant toute cette aventure a été et sera : EMOTION. Les voix d’enfants sont sublimes. Il est vrai que ces enfants sont admirablement dirigés par Karine Locatelli. Étant donné que la formation peut s’étendre de 7 à 17 ans, vous imaginez bien que les rapports au chant, à l’envie, à la scène, varient régulièrement chez les enfants. Les plus grands ont acquis une certaine autonomie dans les rapports humains, dans leur pratique. Ils ont tous de toute façon un rythme de vie assez dense et sont d’une discipline assez impressionnante. J’essayais, tous les jours, de leur apporter sourire et joie et de leur dire de profiter de cette expérience unique qui leur était donnée de chanter sur scène devant des gens !


Marie Gouzonnat : Auriez-vous une anecdote ou un souvenir à partager pour alimenter notre blog ?

Thomas Rortais : J'ai beaucoup aimé tous les moments durant lesquels je me rasseyais dans ma tour, les pieds dans le vide, tourné vers le fond de scène. J’avais à ma gauche l’orchestre et à ma droite tous ces enfants.  C'était très agréable de les voir et de les entendre chanter.


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